domingo, 13 de setembro de 2015





Berg, 1863.


   J'ai dix-huit ans. J'ai obtenu comme cadeau de majorité une semaine de solitude. Plus de frére, de professeurs, de courtisans. Ce caprice a fait três mauvaise impression. On eût voulu promener le prince héritier dans les rues de Munich. (...) J'aime ce petit château familier, l'air vif et pur ce grand lac de Starnberg un peu sauvage, où les hautes touffes de roseaux embarrassent le glissement des barques. L'autre matin, sous un ciel clair, j'ai ramé tout seul, puis immobilisé mon embarcation au milieu de l'eau, jusqu'à ce que celle-ci ait perdu ses rides. Je me suis penché pour voir le reflet de mon visage. Mes grands yeux plongèrent dans mes yeux et je vis courir derrière ma tête des nuages charmants. Le beau moment!
   Je me constatai, majeur, radieux et seul. J'eusse voulu me pencher suffisamment, jusqu'à toucher le reflet de mês lèvres qu'une légère palpitation de la nappe faisait bouger d'un mouvement qui ne naissait pas de mon souffle. Et cette seule, légère, frissonnante différence entre mon reflet et son modèle m'eût suffi, je crois, pour ressentir et consommer tout ce qu'on appelle l'amour.


     Fraigneau, André. Le livre de raison d'un roi fou, Louis II de Bavière. Paris: Éditions de La Table Ronde, 1994, pp 34 - 35.
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